La gare de Moulin-la-Veuve


Youpie! La gare de LLN va changer de nom! Cool! On consulte même les students pour inventer ce nouveau nom super fun! C'est la SNCB qui a eu cette idée géniale pour clôturer sa campagne "go unlimited" qui permet(tait) aux jeunes de voyager pour 25 euro par mois durant les vacances. Et demain on va savoir "qui ka gagné" 

Changer le nom de la gare de LLN... tu rigoles... déjà que pas mal d'étrangers pensent arriver à Leuven en venant chez nous. Changer le nom de notre gare... c'est du remake. D'autres génies s'y sont déjà essayés avec humour. L'illustre économiste, Jacques Drèze, professeur de l'UCL, par exemple. Dans son cours de probabilités, il enchantait ses étudiants avec des exercices évocateurs du genre: "Supposez qu'un parachutiste soit lâché à 1348 mètres au dessus du campus de Moulin-la-Veuve, que le vent soit nul, le recteur de bonne humeur et la vitesse de descente de son parachute de 3m/sec, quelle est la probabilité qu'il tombe dans le lac après 7 minutes et 49 secondes ?" Et tout le monde tombait dans le panneau! Allez savoir pourquoi? À part ça, Moulin-la-Veuve" c'était super bien trouvé après le "Walen buiten!" 

Bon, on verra bien demain si celui qui aura inventé "Louvain-crac-dedans" sera busé ou non. Oui, "Louvain-crac-dedans" ça déchire car sur le trajet LLN-Ottignies, celui qui n'a pas de billet aura 3 agents de répression sur le dos, C'est fou l'argent que la Sncb dépense pour coincer les resquilleurs sur ce tronçon de 4 km qui relie Ottignies à....Ottignies! Elle devrait plutôt inventer quelque chose pour faire des économies sur ce personnel-là et pour prévenir les actes de vandalisme. Un truc du genre "unlimited everyday". Les jeunes prendraient le train d'office... plus de contrôle... plus de mécontents! 

Maintenant, le concours du nouveau nom de la gare, il y avait sans doute mieux à faire. Adapter la gare de LLN à l'arrivée du RER par exemple. Et là, c'est plutôt mal parti. Malgré un giga parking de délestage, rien n'est prévu pour augmenter les cadences. Lisez plutôt, le SoirMagazine du 3 juin nous a concocté un cocktail explosif signé par le journaliste d'investigation P. Engels. En voici un extrait:

Louvain-la- Neuve: pas de RER, mais un (trop) grand parking

C’est “le” chantier de l’année. Un coup de boost pour la gare de Louvain-la-Neuve? Non, le banco réalisé par des promoteurs qui jonglent avec l’argent public. Un matin, les pelleteuses et les tronçonneuses sont apparues à Louvain-la-Neuve sans que les autorités communales n’en aient été averties. Un an plus tard, le plus grand parking jamais imaginé en Belgique fourmille d’engins de tous types. Sur la surface d’un double terrain de football, ça s’active à toute vitesse. Le chantier du “Park & Ride” se moque des saisons et des regards perplexes. Il grossit à vue d’œil. Il laisse entrevoir ses entrailles et, déjà, les piliers qui soutiendront son toit de béton. De la nationale 4 qui relie Namur à Bruxelles, le gigantisme de l’ouvrage a de quoi impressionner. Avec ce potentiel de clients, c’est sûr, il y aurait de quoi emplir quelques trains supplémentaires roulant à grande vitesse vers la capitale. On les imaginerait déjà, ces RER pleins à craquer, 200 mètres plus bas, là où pointent les rails de chemin de fer. Cruelle rêverie! Tout ceci n’est qu’un leurre. Pour de nombreux spécialistes de la mobilité, l’énorme réservoir à voitures qui se dessine en bordure de campus universitaire sert de prétexte à une exceptionnelle opération immobilière. Pour faire bref, le parking souterrain sera bientôt recouvert d’une dalle jetant les bases d’un quartier résidentiel huppé. Qu’importe l’accès aux trains rapides, l’essentiel consiste à valoriser ces terrains grappillés par l’Université catholique de Louvain (UCL) lors du “Walen Buiten” de 1968. Depuis, les bouts de ville se sont développés comme des champignons. Le nouveau quartier construit sur le parking SNCB, nommé Courbevoie, sera adjacent au centre commercial en pleine expansion (L’Esplanade); il bénéficiera de la spéculation qui fait rage en Brabant wallon.

IL FAUDRAIT CASSER CE QU’ON CONSTRUIT


Et les trains? Le groupe SNCB et, donc, la collectivité supportent le coût du parking. On parlait à l’origine de 60 millions d’euros; mais, comme toujours à la SNCB, personne n’est en mesure de chiffrer l’ardoise globale. Seule certitude, ce parking ne tournera à plein régime que lorsque la gare de Louvain-la-Neuve sera adaptée à sa fonction de terminus RER. Une entrée en service reportée à... plus de dix ans. Pour supporter les cadences promises de quatre à six trains aux heures de pointe, il y avait deux options. Il fallait soit prévoir une arrière-gare, soit concevoir une quatrième voie. Et c’est là que le bât blesse. Pour la première solution, consistant à faire manœuvrer les trains en bout de gare, c’est mal parti: il faudrait démolir ce qu’on construit. Quant à l’élargissement de la gare, on peut oublier. La ville d’Ottignies/ Louvain-la-Neuve a délivré un permis socio-économique à la société française Klépierre, grand spécialiste des centres commerciaux. Elle pourra construire l’extension de l’Esplanade sur l’actuelle gare. Impossible de rajouter une quatrième voie, dès lors. Pourtant, dès 2003, la Région wallonne, la SNCB, l’UCL et le “pouvoir” communal s’étaient accordés pour anticiper la transformation de la gare. Ce choix du bon sens avait été confirmé par le bureau d’études Tritel, en 2012: «Dans sa configuration actuelle, la gare de Louvain-la-Neuve sera vraisemblablement à saturation à la mise en service du RER. Une configuration avec une arrière-gare (...) permettrait de réaliser les manœuvres derrière la gare sans en perturber les départs. Cette solution est préconisée à Louvain-la-Neuve. Les emprises sont disponibles dans le prolongement des voies existantes.» Après moult hésitations, la Région wallonne avait fini par dire “oui” à cette arrière-gare. Entre-temps, toutefois, le plus grand parking relais du Benelux est sorti de terre et c’est trop tard! «On a tout fait pour alerter les autorités du surdimensionnement du parking SNCB et de l’inadéquation de la gare, s’indigne le citoyen engagé Michaël Derom, au nom du collectif Urbaverkoi. Enquête publique, recours au Conseil d’État, pétition, interpellation du conseil communal, rien n’y fit. Quelques déclarations publiques pour dire aux électeurs qu’on les soutient, puis le temps passe et on oublie.»

SATISFAIRE À TOUT PRIX LES PROMOTEURS

Du côté des Chemins de fer, on botte en touche. Voici ce que des habitants courroucés ont reçu comme réponse, il y a un an: «Au niveau de la SNCB, nous pouvons vous assurer que le parking, en cours de construction, est situé en dehors de la prolongation éventuelle des voies.» C’est vrai. Sauf qu’il faudrait reprendre les fondations du chantier en cours et creuser un tunnel sous le beau parc et la voirie du quartier résidentiel en construction. Cela serait extrêmement coûteux. Il fallait faire vite pour satisfaire les promoteurs, et en faisant les choses à l’envers, c’est l’argent public qui devrait être sollicité pour compenser ces mauvais choix! Même son de cloche faussement rassurant à l’UCL. Depuis le lancement du chantier, l’Université s’adresse d’ailleurs aux habitants et à la presse en lieu et place de la SNCB. Rien d’étonnant: en tant que propriétaire du terrain, l’UCL pourra revendre la dalle aux promoteurs qui bâtiront les 600 logements en surplomb. L’enjeu du moment est clairement financier. Les questions de mobilité passent au second plan... Sous la précédente législature, le ministre de la Mobilité Philippe Henry (Ecolo) a répondu ceci à ceux qui ont osé contester ces aberrations: «Je déplore comme vous le manque de vision commune et d’anticipation d’Infrabel (la filiale de la SNCB en charge des infrastructures) et de la SNCB Holding, qui n’ont visiblement pas été capables de coordonner leurs actions en vue de la réalisation simultanée de ces importants travaux.» Mais la voix d’un ministre semble aussi efficace qu’un cri dans le désert, car Philippe Henry terminait par ceci: «Il est important de maintenir une pression maximale sur le gouvernement fédéral et la SNCB afin de voir réaliser ce projet d’arrière- gare dans les meilleurs délais.» Fameux constat d’impuissance.
Et Michaël Derom de réagir: «Est-ce le rôle des citoyens de se substituer aux élus, censés gérer la chose publique en bons pères de famille? Demain on aura un parking relais à moitié plein parce que le RER ne suit pas, que la gare est inadaptée, que la Région n’a pas l’argent pour financer les accès ou que l’échangeur autoroutier bouchonne. C’est kafkaïen comme imbroglio. Entre-temps, à qui va profiter ce parking ? Certainement pas aux navetteurs.» Ces emplacements, comme il en existe de nombreux vacants à Louvain-la- Neuve, seront monnayés à vil prix ou serviront aux clients du super-centre commercial. Avec le nouveau ministre wallon Carlo Di Antonio (CDH), on oublie carré- ment toute pression sur la SNCB. Son parti soutient de longue date les projets immobiliers chers à l’UCL. Quand le RER omnibus sera enfin mis en circulation, on peut anticiper la suite. Faute d’argent pour financer les surcoûts, les cadences annoncées ne seront pas au rendez-vous. Le navetteur pressé aura tout intérêt à filer en gare d’Ottignies et à zapper Louvain- la-Neuve et son immense parking de délestage. Trop de temps perdu pour atteindre le lieu de travail. Le parking sera trop grand, mais le nouveau quartier résidentiel et le temple du commerce voisin, eux, feront le plein, ça c’est sûr...
Philippe Engels in Le Soir Magazine du 3 juin 2015

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